Hommage à Simone VEIL

Le 30 juin dernier, nous apprenions avec tristesse le décès de Simone Veil.

A l'évocation de son nom, vient immédiatement à l'esprit la loi qui dépénalise l'IVG et l'IMG, cette fameuse loi Veil dont tout le monde a entendu parler, de près ou de loin, mais qui reste pour beaucoup liée au passé, au siècle dernier.

Et pourtant, c'était en 1975, il y a seulement 42 ans. Autant dire que c'était hier !

Et avant ?

Avant cette date, en France, les femmes qui souhaitaient avorter devaient le faire dans la clandestinité, souvent dans la honte, et toujours avec le risque d'y perdre leur vie.

C'est avec beaucoup de courage et de ténacité que Simone Veil a su mettre au jour et porter devant l'assemblée un combat initié par des milliers de femmes, malgré les oppositions parfois très violentes auxquelles elle a dû faire face.

Exceptionnellement, je souhaite aborder cet hommage de manière plus personnelle.

1975, c'est aussi l'année de ma naissance, 2 ans après celle de ma sœur.

J'ai toujours une émotion particulière en pensant à cette période que, de fait, je n'ai pas vraiment connue : Ma sœur est née « fille », dans une société où le corps des femmes ne leur appartenaient pas ; Je suis née « fille » dans une société où le corps des femmes leur appartenaient enfin.

Ma propre mère a commencé sa vie de femme avec cette interdiction, ce poids inconscient, renforcé par le tabou qui entourait cette question. Aujourd'hui, ça me semble presque surréaliste ... Je ne parle pas de mon arrière-grand-mère ni même d'une quelconque ancêtre, mais bien de ma mère. Nous ne sommes pas si éloignées l'une de l'autre, elle n'est pas « d'un autre temps ».

Comment ne pas faire le parallèle entre nous 2 : lorsque je suis devenue mère pour la première fois j'ai justement été confrontée au choix douloureux de l'IMG. J'ai été accompagnée et soutenue dans cette décision.

Qu'en aurait-il été pour ma mère ? Lorsqu'elle est devenue maman pour la première fois, elle n'aurait pas eu ce choix.

Grâce à cette loi, j'ai pu vivre cette maternité si particulière et mon histoire avec mon fils avec une certaine douceur, et surtout l'accompagner jusqu'au bout de sa si courte vie comme je l'avais décidé. Son souvenir ne sera jamais lié à un traumatisme supplémentaire dû à l'illégalité ou au non-choix, ce souvenir peut rester serein. Nous avons eu la possibilité de prendre, en couple, la décision qui nous paraissait la plus juste pour notre enfant et pour nous. Ce n'est pas rien.

Bien sûr ce choix que nous sommes nombreux à avoir fait, et qui aurait été refusé à nos propres mères, est toujours douloureux. Ce n'est jamais une décision prise à la légère, bien au contraire. Chaque année, ce sont environ 7000 couples qui sont confrontés à l'annonce du lourd handicap ou de la maladie létale de leur enfant à naître. Doivent-ils interrompre cette grossesse ? Choisir les soins palliatifs ? Accueillir cet enfant ? C'est à eux et à eux seuls qu'il appartient de prendre cette décision si personnelle, si intime même, concernant l'avenir de leur tout-petit, l'avenir de leur famille. Tout simplement parce qu'aujourd'hui, la loi l'autorise.

Petite Emilie n'a pas pour vocation d'être militante, mais simplement d'accompagner et soutenir les personnes (parents, familles, professionnels) confrontées à l'IMG.

Pour autant la loi Veil fait partie de l'ADN de l'association.

Il nous paraît donc indispensable de rappeler la fragilité de cette avancée, finalement si récente, et qui est loin d'être une évidence dans d'autres pays, y compris en Europe, pour qu'elle ne soit jamais reléguée au rang de « vestige du passé », mais qu'elle reste un héritage précieux, qu'il nous appartient de préserver, de transmettre, d'entretenir, avec cette même ténacité dont a fait preuve Mme Veil.

Cette grande dame restera parmi les personnes les plus inspirantes de l'histoire de notre pays, et de par son parcours de vie exceptionnel, un modèle de résilience.

Adeline