Témoignage d'une donatrice et maman endeuillée : Anaïs Lauret
L’association Petite Émilie ce sont des outils :
*Une boite mail
*Un forum
*Un site internet
*Des livres pour la fratrie
*Des réseaux sociaux
Et aussi des actions telles que des formations pour les soignants et les agents publics, et la participation de nos bénévoles à des congrès médicaux.
Tout cela est rendu possible grâce à la générosité de nos donateurs, adhérents et bénévoles !
Aujourd’hui nous voulions remercier chaleureusement Anaïs Lauret, donatrice et maman endeuillée, et vous raconter son histoire qui l’a amené à faire ce don pour Petite Émilie.
« En 2009, nous devions accueillir notre premier enfant, un petit garçon, grossesse au top, un bébé qui était prévu plutôt grand et costaud mais aucune inquiétude, tout se passait bien.
Et puis, le 17 décembre, à 3 jours du terme, je ne l’ai plus senti bouger. Allez, je suis infirmière, pas de panique, on essaie les positions sur le côté, on attend, on se dit que ce n’est pas possible. J’attends mon mari, il rentre du travail, on appelle la maternité : pas de souci, « venez faire un petit monito, il doit avoir moins de place, en fin de grossesse, on les sent moins bouger. »
Très bien, nous nous préparons, il neige ce jour là, accueillis à la maternité par la sage femme, écho directement, pour se rassurer… elle cherche, encore et encore, c’est long, elle finit par me dire « je suis assez pessimiste, je vais appeler le gynécologue » que pouvait elle me dire d’autre? La pauvre devait ne pas savoir quoi dire, quoi faire… allez on s’inquiète mais on se dit, attendons le gynécologue… il vient et nous confirme : « le cœur ne bat plus, je ne comprends pas »
Le monde s’écroule, je pleure, je hurle… mon mari pleure et ne sait plus quoi dire… on nous met dans une chambre, en maternité, loin des chambres mais pourtant on entend les nouveaux nés. La sage femme prévient mes parents, nous allons rentrer et le bébé est décédé.
Le protocole veut que je doive rentrer chez moi avec mon bébé mort dans mon ventre… revenir en consultation le lendemain. Je ne sais pas par où commencer tellement la violence est difficile à supporter… retour chez nous, un ventre énorme, un bébé qui ne bouge plus, la chambre prête à l’accueillir, prévenir la famille, les amis, ma meilleure amie au téléphone qui me dit « mais ce n’est pas possible » la cigarette que je m’autorise à fumer et ma maman qui me dit « tu ne devrais peut être pas… » comme si ça allait faire du mal à mon bébé… je n’ai que des flashs de ces moments… violents et très précis.
2ème jour, 3ème jour et enfin un travail qui se déclenche, un accouchement par voie basse, difficile car mon Léo mesurait 55 cm et pesait 4,300kg. On décide de le voir, de le prendre dans nos bras. Des photos sont prises par la sage femme. Le temps est suspendu, il a cette déformation du crâne car 3 jours dans mon ventre, en appui, sans vie… je ne vois rien de cela, je vois mon bébé, mon tout petit, mon amour, et le moment est doux… là aussi, les souvenirs sont puissants, précis et douloureux.
S’en suivent des jours que l’on n’imagine pas, le retour à la maison, les douleurs, l’autopsie, la crémation, le colombarium… l’impuissance de nos familles, de nos amis, malgré leur amour, les mots maladroits qui marquent même si on sait que c’était pour que nous allions mieux.
L’autopsie révélera qu’il n’y avait aucune anomalie, pathologie ou autre… à ce jour nous ne savons toujours pas pourquoi son cœur s’est arrêté…
Nos familles et amis nous offrent un voyage à la réunion, nous partons et nous retrouvons 2 amis là bas, je ne suis pas un cadeau, terriblement triste, et cassée de l’intérieur. Mais ça fait du bien… il faudra bien rentrer à un moment, dans cette maison ou une chambre de bébé est prête. La chambre de Léo. Je ne reprends le travail qu’après le congé maternité… des journées à pleurer dans sa chambre. Pourtant entourée mais ce manque est viscéral … et puis une grossesse extra utérine, mon corps n’est sûrement pas prêt à accueillir un nouveau bébé, hémorragie interne, opérée en urgence un jour de travail.
Cette fois, je vais bosser sur moi. Et heureusement pour nous, je tombe facilement enceinte, mon bébé Tom puis Hugo, et enfin Thibo, 3 garçons d’amour, qui savent la totalité de notre histoire familiale. Et qui compte Léo comme leur grand frère, même si cela reste très abstrait pour eux.
Nous avons la chance vraiment d’être entourés par nos familles et amis, qui ont toujours compté Léo, comme faisant partie de notre famille, quelle chance!
Mes amis ce sont tous des amis de très longues dates, entre autres Béren et Émilienne (Mimi) : nous nous sommes connues en petite section de maternelle et toujours amies à l’heure actuelle. On a le même âge, on se suit, nos enfants sont amis, nous habitons le même petit village, nos parents sont amis, bref, une solide amitié.
Et l’envie de faire un « truc » pour nous, pour se dépasser, pour nos 40 ans. Le trek! Avec le trekking Gazelles : course d’orientation dans le désert marocain, 4 jours de trek à pied, sans portable, avec carte et boussole, au profit du secours populaire, des populations marocaines et surtout des femmes. Une expérience unique et qui nous a profondément marqué. Nous étions dans une bulle de bienveillance, et nous vivions quelque chose pour nous.
J’ai le souvenir d’une journée dans les dunes où en haut d’une dune, le calme, la connexion avec mes émotions et les larmes qui me viennent, une pensée pour Léo, je suis sûre qu’il serait fier de moi à ce moment précis, et tous les autres jours. Le retour à la réalité a été difficile tellement nous avons réussi à nous mettre dans une bulle, grâce à nos maris, nos enfants et tous ceux qui nous ont soutenu!
En revenant, on s’était dit qu’on ferait des dons à des associations car on avait la chance d’avoir encore un peu de sous sur le compte de notre association. Indéniablement, nous avons toutes pensé à une association autour du cancer du sein car très sensibilisée personnellement et professionnellement. Et quand j’ai dit aux filles que j’aimerais aussi faire un don à votre association, elles m’ont répondu qu’elles étaient ravies d’accomplir avec moi ce qui me tenait à cœur ❤️ C’est chose faite.
Il n’y a pas une seule journée, je dis bien une seule journée sans qu’un flash, une odeur, un sentiment, une image de Léo ne me revienne, les jours passent, on vit, on apprend à vivre avec le manque, on avance mais cette douleur au plus profond des viscères n’est jamais, jamais loin. J’aurai toujours, toujours un manque, des questions, des remords, des « et si » qui restent sans réponse. J’ai appris à vivre avec et apprends toujours 🥲 »
Anaïs Lauret
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