Pourquoi je soutien Petite Emilie - Témoignage
Se retrouver en salle d’accouchement pour mettre au monde son bébé sans vie n’est pas dans l’ordre des choses. Bien qu’inhumain, le passage en salle d’accouchement ne restera pas pour moi le pire de cette expérience*. Le pire restera l’après.
Qui est-on après un tel drame ? Des parents sans en être vraiment ? Pourquoi et comment y survivre ? Quelle place pour ces tout-petits morts ? Le risque de se perdre dans les questionnements suscités par ce sentiment d’avoir donné la mort et non la vie est bien réel.
Accoucher du silence mais pas dans le silence
Parce qu’en la matière, l’imagination n’a que très peu en commun avec la réalité, les parents qui ont à faire ce chemin de la reconstruction se retrouvent facilement socialement isolés, en prise à une grande incompréhension dont peuvent résulter détresse, amertume, colère et frustration. Trop souvent, il faudrait accoucher du silence dans le silence, faute de quoi le souvenir de l’enfant perdu et la souffrance exprimés suscitent des réactions inappropriées, taxant les parents (que l’on oublie endeuillés) de pensées morbides, d’un trop grand focus sur le passé au détriment de l’avenir, d’une forme de complaisance dans la douleur… Se remettre rapidement et ne pas trop en dire sur la réalité de ce deuil qui demeure encore aujourd’hui, et malgré des avancées notoires ces dix dernières années, entouré d’une forme de déni social. Voilà ce que beaucoup attendent de ces parents désenfantés. Certes ces enfants n’ont pas eu le temps d’être tout à fait : ils n’ont vécu que dans le ventre de leurs mères et dans la tête de leurs parents. Mais faut-il pour autant ne pas faire preuve d’un minimum d’empathie et ne pas reconnaitre la douleur dans laquelle leur perte plonge leurs mères et leurs pères ? Cette douleur ne saurait se mesurer au nombre de semaines de grossesse ; je pense qu’elle est tout simplement proportionnelle à l’amour et à la place que les parents accordaient déjà à leur bébé. Elle est tout autant variable que le temps qui sera nécessaire à chacun pour commencer à se relever.
Pour toutes ces raisons et parce que l’après se prépare autant que faire se peut avant, pendant et après l’accouchement, il est vital pour ces parents d’être accompagnés et de pouvoir échanger à chaque étape de leur douloureuse expérience avec des personnes « ressources », de celles qui contribuent à accueillir nos tout-petits morts avec tout le respect et toute la tendresse qui sont dus à leur petite personne, de celles qui contribuent à accueillir aussi longtemps que nécessaire le chagrin de ces parents amputés d’une partie d’eux-mêmes pour qui la vie demeurera fragile mais pourtant possible.
Après avoir perdu ma toute petite*, j’ai su prendre ce chemin, celui de la reconstruction. J’ai mis 5 à 6 mois pour le trouver. Durant cette période, j’ignore ce qui a été le plus douloureux entre le silence des personnes qui ont fait comme si rien de tout cela ne m’était arrivé (pas un mot, jamais), et la virulence des propos de celles qui m’invitaient à « tirer un trait » ou me « faire violence » pour reprendre le cours de ma vie et « saisir le bonheur à portée de mains ». Ce que je sais c’est que j’ai appris à identifier les personnes « ressources » (et il y en a eu de formidables) tout en me protégeant des autres. La colère s’apaisant, j’ai appris à ne plus hurler mon chagrin même si le besoin de le dire est toujours là. En parler, partager, cela participe à ancrer le passage de ma fille dans ma vie. Soutenir autant que possible ceux qui passent par cette épreuve. Briser le tabou. Contribuer à ce que le nombre des personnes « ressources » continue de grandir, au sein des institutions, au sein du personnel soignant, au sein de notre entourage, parmi nous.
L’aventure RESPONSEO
C’est ainsi que s’est profilé le souhait d’embarquer Petite Emilie dans l’aventure RESPONSEO, le rendez-vous annuel de responsabilité sociétale de Philips France. A travers ce concours, Philips France offre à ses salariés (dont je suis) l’opportunité de parrainer une association de leur choix. Seule condition : l’association doit œuvrer dans le domaine de la santé ou de l’éducation sur le territoire français. Au terme d’un vote ouvert à tous les employés, les 10 associations ayant remporté le plus grand nombre de voix sont récompensées par une dotation financière allant de 1000 à 15000€.
Cette 8ème édition de RESPONSEO a regroupé 26 associations. Le concours a débuté par la journée Portes Ouvertes qui s’est tenue le 4 novembre au siège de Philips France et au cours de laquelle chaque association a pu présenter ses actions et ses projets. 1001 votants se sont exprimés, soit 43% des salariés, et cet événement s’est soldé le 21 novembre par la remise des prix.
Au-delà de la recherche de fonds, ce fut l’occasion de faire connaitre Petite Emilie et de dialoguer autour du thème du deuil périnatal. Des échanges, du partage, de la mobilisation, une précieuse rencontre avec les ambassadrices de l’association SOS Préma… et une dixième place ex-aequo !
Mille mercis aux bénévoles de Petite Emilie de m’avoir suivie dans cette aventure.
*Merci à l’équipe médicale de m’avoir si bien entourée et accompagnée.
*Zelda, née sans vie à 20 SA le 15 mars 2012.
Héloïse
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